Retour de Joseph Kabila à Goma : Denis Mukwege dénonce « des signes qui ne trompent pas »

Le retour très commenté de Joseph Kabila à Goma, dans l’Est de la République Démocratique du Congo, continue de faire réagir. Cette fois, c’est une figure internationale du combat pour la paix et la justice, le Docteur Denis Mukwege, qui s’en est vivement indigné. Invité ce mercredi sur France 24, le prix Nobel de la paix n’a pas mâché ses mots à l’égard de l’ancien président de la République.

Pour celui que l’on surnomme « le réparateur des femmes », cette visite n’est pas anodine, mais porte les stigmates d’un retour calculé, orchestré dans une région meurtrie par des conflits armés persistants et des ingérences étrangères.

« Son discours est clair. De toute façon, il n’a pas dénoncé le président rwandais comme agresseur alors que nous avons la résolution 27113 qui demande au Rwanda de quitter la République démocratique du Congo, et ceci sans condition », a lancé Mukwege, faisant référence à la récente résolution des Nations Unies exigeant le retrait des troupes rwandaises du territoire congolais.

Mais ce qui scandalise davantage le gynécologue de Panzi, c’est le silence de Kabila sur l’implication du Rwanda dans les violences qui ravagent la région.
« Il n’a pas fait allusion à ça. Et puis il est entré par le Rwanda. Pour moi, ce sont des signes qui ne trompent pas », a-t-il insisté, laissant entendre qu’un tel choix logistique ne relève pas du hasard, mais bien d’un message politique ambigu, voire inquiétant.

Une « compromission » déjà vue

Pour Mukwege, ce retour inattendu de Joseph Kabila dans le Kivu ressemble à un scénario déjà vécu, où la compromission politique prend le dessus sur la souveraineté nationale.
« Je dois dire que ce qu’il est en train de faire, c’est du déjà vu », a-t-il déploré, visiblement amer.

Le prix Nobel met en garde contre la tentation d’oublier les leçons du passé, alors que la RDC est de nouveau confrontée à une escalade sécuritaire orchestrée, selon Kinshasa et plusieurs rapports internationaux, par le régime de Kigali avec le soutien présumé à la rébellion du M23.

Dans une posture fidèle à son engagement pour la vérité, la justice et la mémoire des victimes, Denis Mukwege appelle implicitement les Congolais à ne pas banaliser le retour des anciens acteurs politiques au passé controversé, ni à ignorer les silences complices face à l’agression étrangère.

Cette prise de parole intervient alors que le gouvernement congolais, par la voix de plusieurs ministres, s’est déjà dit préoccupé par les intentions non déclarées de Joseph Kabila dans la région. Le climat politique se tend à l’approche des échéances électorales et dans un contexte d’extrême fragilité dans l’Est.

Par la rédaction