Kabuya contre-attaque : « Kabila doit laisser les Congolais traiter leurs problèmes, parce qu’il n’est pas Congolais »

 

La réponse n’a pas tardé. Fidèle à sa promesse du 24 mai, Augustin Kabuya, secrétaire général de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS/Tshisekedi), a répondu avec virulence au discours récemment prononcé par l’ancien président de la République, Joseph Kabila. Ce dimanche 25 mai, devant une foule dense rassemblée au siège du parti présidentiel à Kinshasa, il a livré une réplique percutante, mêlant accusations de détournements de fonds à des attaques d’ordre identitaire.

C’est dans un ton martial que Kabuya a dressé un réquisitoire sévère contre les années Kabila, accusant l’ancien chef de l’État, au pouvoir de 2001 à 2019, d’avoir dirigé le pays dans une impunité financière totale.

« Sous le régime Kabila, il y a eu le détournement de 32 millions de dollars destinés à la SNEL, et personne n’a été inquiété. Ils ont mangé 300 millions de dollars destinés à la police par le ministère de l’Intérieur. Le détournement d’1 milliard 345 millions de dollars destinés aux cinq chantiers, et personne n’a été envoyé en prison… », a-t-il martelé, dans une longue énumération de chiffres évoquant des montants colossaux évaporés dans les circuits de l’État sous la présidence Kabila.

Dans sa tirade, Kabuya a également dénoncé ce qu’il considère comme une série de scandales restés sans suite : 300 millions de dollars pour la riposte contre Ebola, 756 millions pour la réforme de la police, 160 millions pour la construction de stades à Kikwit, sans oublier les fameux 30 milliards de dollars du contrat chinois censé porter le développement de la RDC.

Mais c’est sur le terrain glissant de la polémique identitaire que le secrétaire général de l’UDPS a fait sensation. Relançant les accusations récurrentes sur la prétendue nationalité étrangère de Joseph Kabila, il a lancé, sous les acclamations de ses militants :
« Kabila doit laisser les Congolais traiter leurs problèmes, parce qu’il n’est pas Congolais. Bien qu’il soit un collègue président de parti politique (…), c’est un sujet rwandais. »

Ces propos, largement relayés sur les réseaux sociaux, ont immédiatement ravivé les tensions autour de la figure de Kabila, à peine sortie de son silence après six années d’absence médiatique. Son allocution du week-end précédent, prononcée devant ses partisans, constituait une charge frontale contre la gouvernance de Félix Tshisekedi, accusée de corruption et de mauvaise gestion.

La prise de parole de Kabila est intervenue dans un contexte particulier, moins de 24 heures après la levée de ses immunités parlementaires par le Sénat, votée à une majorité écrasante. Une décision qui laisse entrevoir une possible mise en cause judiciaire de l’ex-président dans les prochaines semaines.

Parallèlement, Joseph Kabila a entamé ce dimanche un déplacement à Goma, chef-lieu du Nord-Kivu, où il a été aperçu en compagnie de plusieurs cadres de son parti, le PPRD. Un voyage qui n’est pas anodin dans une province toujours en partie contrôlée par la rébellion M23, soutenue par le Rwanda selon Kinshasa et de nombreuses organisations internationales. Les forces d’occupation ont confirmé sa présence dans la ville.

Alors que les lignes bougent sur le plan politique et judiciaire, cette joute oratoire entre deux poids lourds de la scène congolaise préfigure un affrontement à haute intensité dans les mois à venir. Le duel Kabila-Tshisekedi, désormais joué par procuration à travers leurs lieutenants, s’invite à nouveau au cœur de l’actualité nationale.

Rédaction