Afrique : Une pétition historique pour la justice climatique soumise à la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples

La Plateforme africaine sur le climat(ACP), en partenariat avec l’Union panafricaine des avocats (PALU), a officiellement déposé une pétition auprès de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, basée à Arusha, en Tanzanie.

Objectif : obtenir un avis consultatif sur les obligations des États africains face au changement climatique, à la lumière des instruments juridiques régionaux, notamment la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, le Protocole de Maputo, la Convention de Kampala et la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant.

Cette démarche juridique, saluée comme une avancée décisive, vise à ancrer une réponse continentale unifiée aux défis posés par la crise climatique, à travers les principes fondamentaux des droits humains.

« L’Afrique est le continent qui a le moins contribué aux émissions mondiales de gaz à effet de serre, mais elle subit de plein fouet les effets dévastateurs de la crise climatique. Cette initiative juridique vise à garantir la justice, la protection et la dignité de millions d’Africains, aujourd’hui et demain », a déclaré Alfred Brownell, directeur de campagne de la Plateforme africaine sur le climat.

L’accord d’Arusha : plus qu’un acte juridique, un symbole d’unité et de résilience

La pétition, élaborée lors d’un rassemblement continental de juristes, activistes climatiques et défenseurs des droits humains à Arusha depuis le 27 avril, aborde des thématiques essentielles : le droit à un environnement sain, à l’eau, à la santé, au logement, à l’alimentation, mais aussi la responsabilité des pollueurs historiques et le devoir de protéger les groupes vulnérables. Elle insiste sur la nécessité de promouvoir une transition énergétique juste, de décoloniser la gouvernance des ressources naturelles et d’assurer une tolérance zéro face aux représailles contre les défenseurs de l’environnement.

Paul Mulwindwa, représentant de CIVICUS en Ouganda, a témoigné : « Les sécheresses prolongées et croissantes ont dévasté les communautés pastorales. Rien qu’au Kenya, plus de 2,6 millions de têtes de bétail sont mortes, ce qui a entraîné des déplacements, une insécurité alimentaire et une escalade des conflits autour des ressources, mettant en péril les moyens de subsistance traditionnels. »

Peter Quaqua, de la plateforme MRU CSO au Libéria, a ajouté : « La chaleur record et l’effondrement des rendements de cacao brûlent nos économies et font des victimes. Le changement climatique transforme la terre fertile de l’Afrique de l’Ouest en une zone de désespoir et d’injustice. »

Pour Dorcas Sikujua Faida, militante de la République démocratique du Congo, « la triple crise des inondations, de la sécheresse et de la montée des conflits aggrave l’instabilité et détruit les moyens de subsistance. Le changement climatique accable des États déjà fragiles et rend les communautés de plus en plus vulnérables. »

Une idée soutenue également par son compatriote Maître Olivier Ndoole, Avocat d’intérêt public, défenseur de l’environnement / Avocat vert, Prix Mondial Global Citizen 2024 Climat, Prix Front line defenders 2023 foncier et environnement, Face of Conservation IUCN NL 2017 : « C’est un espoir pour la défense de nos droits, un espoir pour l’Afrique en matière de protection des droits des communautés locales, grâce à cette jurisprudence qui pourrait en découler. »

L’activiste égyptienne Shahinaz Adel a souligné : « L’impact de la crise climatique est surtout ressenti par les femmes et les jeunes filles qui sont les soutiens et les gardiennes de la famille ; cela s’ajoute aux obligations culturelles qui leur sont imposées par les traditions africaines et religieuses. »

Enfin, la voix de la jeunesse s’est élevée avec force à travers Inna Maria Shikongo, artiste et influenceuse namibienne : « Il est temps d’affronter les inégalités et les injustices que les femmes et les jeunes subissent chaque jour sur tout le continent et qui sont induites par le changement climatique. »

Vers une nouvelle jurisprudence climatique africaine

Cette action marque la première fois que la société civile africaine recourt à la compétence consultative de la Cour pour faire entendre la voix du continent face à l’urgence climatique. Les initiateurs espèrent que la Cour définira clairement les obligations juridiques des États dans un contexte de crise environnementale croissante.

« L’accord d’Arusha » pourrait bien devenir une pierre angulaire de la jurisprudence climatique africaine, affirmant la volonté des peuples de construire un avenir juste, résilient et ancré dans la dignité humaine.

La rédaction