Le ministère public a requis une peine de 20 ans de servitude pénale et 10 ans d’inéligibilité contre l’ancien Premier ministre Augustin Matata Ponyo Mapon, dans le cadre du retentissant procès Bukanga Lonzo. Le verdict est attendu pour le 14 mai 2025, après que la Cour constitutionnelle a pris l’affaire en délibéré.
La sentence, si elle est confirmée, marquera un tournant historique dans la lutte contre la corruption en RDC, mettant en cause un ancien chef du gouvernement encore sénateur à vie.
Absence remarquée de Matata à l’audience
Le mercredi 23 avril, Matata Ponyo a brillé par son absence à l’audience, estimant que la Haute Cour devait d’abord répondre à la demande de l’Assemblée nationale relative à la levée de ses immunités parlementaires. Une position qui, selon certains juristes, n’a pas lieu d’être, la Cour constitutionnelle étant compétente à juger les hauts responsables sans autorisation préalable dans certains cas de figure.
Un procès hautement politique ?
Les membres du Parti du Peuple pour la Reconstruction et la Démocratie (PPRD), formation politique de l’ancien président Joseph Kabila récemment suspendue sur toute l’étendue du territoire, dénoncent quant à eux une “manipulation politique orchestrée par le régime Tshisekedi”.
“Il s’agit d’une instrumentalisation manifeste du pouvoir judiciaire”, dénonce un cacique du PPRD sous couvert d’anonymat.
La Cour reste ferme sur son indépendance
Le président de la Cour constitutionnelle, dans une intervention marquante, a fermement rejeté toute tentative d’ingérence parlementaire :
“La Cour n’a pas connaissance d’une quelconque décision ou prise de position de l‘Assemblée nationale. Les députés peuvent parler, ils sont libres. Mais l’institution, elle, n’a pris aucune position. L’article 151 de la Constitution consacre l’indépendance du pouvoir judiciaire“, a-t-il déclaré.
287 millions de dollars envolés
L’affaire remonte à la mise en œuvre du projet agro-industriel de Bukanga Lonzo, lancé en grande pompe sous Matata Ponyo. Selon les conclusions de l’Inspection Générale des Finances (IGF), ce projet s’est soldé par un échec retentissant ayant causé la perte de plus de 287 millions de dollars au Trésor public.
“Ce projet est un désastre financier. Matata Ponyo est l’auteur intellectuel, matériel et principal des détournements“, soutient un rapport de l’IGF.
Outre Matata Ponyo, le dossier implique également Deogratias Mutombo, ancien gouverneur de la Banque centrale du Congo, et Kristo Grobler, patron d’Africom.
Un dossier à haute portée symbolique
Le procès Bukanga Lonzo s’inscrit dans la continuité d’un processus judiciaire visant à assainir la gouvernance publique en RDC. Jamais un ancien Premier ministre n’avait été aussi lourdement mis en cause pour détournement de fonds publics.
La République tout entière attend désormais le 14 mai, jour du verdict, qui pourrait ouvrir un nouveau chapitre dans la lutte contre l’impunité au sommet de l’État.
La rédaction
