Ils violaient avant mais combattent aujourd’hui les violences à Nyiragongo: ils sont les champions du genre !

Ils sont d’anciens auteurs et/ou victimes des violences basées sur le genre (VBG) dans le territoire de Nyiragongo. Formés sur les VSBG grâce au programme genre ‘GEWEP’ de la dynamique des femmes juristes (DFJ), ils sont aujourd’hui des hommes et des femmes modèles, ce qui leur a valu le statut de champion du genre.

Les champions du genre sont originaires de divers horizons de la société du territoire de Nyiragongo. Parmi eux, on compte des agriculteurs, des étudiants, des enseignants, des leaders locaux et des membres de la société civile. Plusieurs étaient auteurs des VBG, par le passé, mais se sont convertis grâce aux sensibilisations du programme GEWEP.

Leurs groupes concentrent 20 membres qui s’adonnent dans chaque groupement de Nyiragongo à sensibiliser sur le genre, mais aussi à résoudre certains différends liés au genre que rencontrent plusieurs foyers. Outre Nyiragongo, les champions du genre existent également dans les territoires de Rutshuru, Masisi et Lubero au Nord-Kivu, dans l’Est de la R.D.Congo.

L’objectif ultime des champions du genre c’est de mettre fin à l’exclusion de la femme. Les champions font un effort pour impliquer tous les membres de la communauté dans la recherche des solutions et la prise de décision.

‘’La communauté nous fait désormais beaucoup plus confiance qu’à la justice’’

C’est ce qu’explique Éric Safari, champion du genre dans le groupement Buhumba, dans l’extrême nord-est de Nyiragongo. ‘’Vous savez, la justice et d’autres institutions publiques en RDC sont marquées par la corruption et le monnayage des services. Du coup, pour les problèmes liés aux violences, les foyers se réfugient chez nous et nous réglons leurs problèmes’’, confie Éric Safari.

Le jeune homme, instituteur de son état, fait observer que la forme de violences la plus répandue dans le groupement Buhumba, c’est la violence économique. Avec d’autres champions, il sensibilise les hommes sur l’avantage d’utiliser équitablement les revenus des champs. En effet, dans les villages de Buhumba, les hommes s’approprient la production agricole (des pommes de terre notamment) après que leurs femmes ont semé, souvent dans des conditions difficiles.

‘’Chaque fois qu’ils ont un problème, les familles de mon village font d’abord référence à moi pour que je les oriente vers la justice si nécessaire’’, fait savoir Agnès Balike, championne du genre dans le groupement Munigi. Présidente du réseau local des associations villageoises d’épargne et crédit (RAVEC), elle est restée engagée pour contribuer au changement dans la société, depuis sa formation. ’’Je résous souvent les problèmes liés aux enfants abandonnés lors qu’un homme se marie après le décès de sa femme…Je sensibilise également les hommes sur l’importance de conclure un mariage civil avec leurs femmes. Ils n’en ont pas l’habitude et avancent souvent le motif selon lequel, les femmes deviennent têtues une fois qu’elles ont le mariage civil’’, explique Agnès Balike.

Feza Bigaruka est une championne active dans le village de Kasenyi. Elle travaille presque à plein temps. Même de passage dans un village, il lui arrive de s’arrêter pour réunir les gens dès qu’il s’agit d’une situation de VSBG. ‘’Ici, c’est courant de voir une fille privée du droit d’héritage ou de scolarité juste parce que c’est une fille. Nous faisons un effort pour sensibiliser les gens en vue d’un changement.’’, dit-elle.

Outre la privation des droits et l’exclusion, le territoire de Nyiragongo c’est aussi les violences sexuelles, que les organisations de la société civile rapportent presque chaque semaine. Champion engagé dans le village Rukoko, Devos Mutimatonda sensibilise la communauté sur les services sanitaires et judiciaires dont la survivante a besoin, pour sa protection. Mais à côté des violences sexuelles, ce champion a remarqué que les violences physiques sont aussi courantes dans les foyers sauf qu’elles ne sont pas dénoncées à la justice. Devos Mutimatonda appelle les hommes à pratiquer la masculinité positive.

Le changement est possible et la société inclusive n’est pas un mythe, à en croire la Dynamique des femmes juristes (DFJ) qui souligne aussi qu’il y’a lieu de donner de la place à tout le monde.